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La situation réelle des Chinois en France
2013-01-25 10:03:55
china.org.cn
Peng Shuyi (Académie des Sciences sociales de Chine)

L’Association des jeunes chinois de France (AJCF) a publié une annonce fin 2012, déclarant qu’elle avait mandaté SOS Racisme, une association antiraciste de France pour intenter un procès contre Le Point pour « diffamation envers les Chinois en France » suite à la publication d’un article insultant pour leur image.

Cet article titré L’intrigante réussite des Chinois en France a été publié dans l’édition du 23 août de l’hebdomadaire. L’article comprenait un grand nombre de termes tels que « prostituée », « mafia », « jeux » et décrivait « le mode d’emploi du succès » du Chinois type ainsi : « débarqué clandestinement en France... travaille illégalement dans un restaurant... Trois ans plus tard, paye la dette... Au bout de dix ans, obtient une carte de séjour... Au bout de quinze ans, devient entrepreneur ». Cette publication a indigné grandement les Chinois de France. L’AJCF a déclaré dans son annonce que cet article recelait un racisme évident et avait exercé une influence pernicieuse sur la société, ajoutant qu’elle poursuivrait en justice le directeur de la publication.

Pourquoi cet article a-t-il tellement ému la communauté chinoise ? Pourquoi un média français a-t-il pu faire un tel reportage ? Avant d’y répondre, passons en revue la situation des Chinois en France.

 

L’état actuel des Chinois en France 

Ils sont plus de 400 000 en France et se divisent principalement en trois catégories : anciens réfugiés, travailleurs de Wenzhou, étudiants. Premièrement, au milieu et à la fin des années 70, pour fuir les guerres d’Indochine, 140 000 Chinois d’Asie du Sud-Est partaient se réfugier en France. Deuxièmement, depuis les années 80, des jeunes des provinces du Jiangsu et du Zhejiang, parmi lesquels dominaient les gens de Wenzhou, sont allés en France pour chercher du travail. Ils sont maintenant 130 000. Troisièmement, à tout moment, il y a un nombre important de Chinois qui partent étudier en France. Au début, c’étaient principalement des étudiants soutenus financièrement par le gouvernement. Avec le développement économique de la Chine, les étudiants non boursiers ont été de plus en plus nombreux et ont dépassé en nombre les boursiers. Aujourd’hui, les étudiants chinois constituent un groupe considérable. Par ailleurs, depuis les années 90, des travailleurs licenciés des anciennes bases industrielles du Nord-Est de la Chine sont allés chercher du travail dans des pays riches. Un petit nombre d’entre eux ont mis le cap sur la France.

Par conséquent, il y a une grande différence entre les Chinois de France quant à la raison de leur présence, l’age, la profession, le statut économique et social ou encore le niveau d’instruction.

Pour chacune de ces catégories, l’existence était différente. Les Chinois venus d’Asie du Sud-Est furent les premiers immigrés. Ils sont arrivés en France sans un sou et leur premier souci était de nourrir la famille. Ils connurent le modèle de développement suivant : travailler péniblement et vivre frugalement... Après avoir accumulé un certain montant, lancer un commerce comme une épicerie ou un restaurant... Après s’être implanté solidement, agrandir le commerce ou investir dans d’autres domaines. Les gens de Wenzhou eurent un mode d’existence et de développement similaire à celui des premiers immigrés. Mais ils se caractérisent davantage par la solidarité, le soutien mutuel et le partage des bénéfices entre les gens originaires du même lieu. Les ouvriers licenciés originaires du Nord-Est de la Chine sont quant à eux pour la plupart relativement agés et moins qualifiés. Beaucoup d’entre eux travaillent en tant que coiffeur ou cuisinier. Une petite partie des femmes d’age moyen sont devenues des filles des rues. Les étudiants chinois sont le groupe le plus dynamique. Après la fin des études, nombre d’entre eux restent en France pour travailler ou créer leur entreprise. Ils sont actifs dans les différents secteurs économiques et sociaux de France.

Le degré d’intégration varie aussi. Les premiers immigrés étaient relativement fermés et s’étaient moins intégrés dans la société française en raison du bas niveau d’instruction, de l’obstacle de la langue et d’un contexte culturel différent. Ils ont formé une communauté chinoise repliée sur elle-même. Une partie d’entre eux a bien réussi dans les affaires et est entrée dans les rangs de la classe moyenne. Certains savants ou artistes parmi eux sont entrés dans l’élite de la société française.

Les Chinois de la nouvelle génération, surtout les étudiants, sont bien différents des premiers. Ils sont bien instruits, parlent le français et font divers métiers. Ils entrent plus profondément en contact avec la société française et s’y intègrent mieux que les premiers immigrés. Une partie relativement grande a connu un beau développement dans son domaine particulier et remporté le succès. Ils sont très différents des premiers immigrés, qui avaient commencé à partir de zéro, dans la conception de la vie et du monde, le mode de vie et le statut social.

 

D’où proviennent les préjugés 

En comparaison avec les immigrés d’autres ethnies, les Chinois en France, qui ont hérité de la tradition de la nation chinoise, ont de nombreux points forts. Ils sont travailleurs, modestes et prudents et font attention à l’éducation des enfants. Les Chinois, quelle que soit la période où ils sont arrivés en France, comptent sur leurs propres efforts dans la vie, jamais sur l’assistance de l’état. Ils ont apporté leur contribution au développement économique de France. Citons l’exemple de Belleville à Paris. Au début des années 1970, c’était encore un quartier miteux et désert. Avec l’arrivée des Chinois, qui s’y sont installés et ont travaillé dur, Belleville est devenu un quartier dynamique et prospère dans le commerce. En outre, les Chinois sont généralement très discrets et indulgents, et n’ont jamais provoqué de troubles. En revanche, des immigrés d’autres ethnies profitent du système de protection sociale français. Ils ont donné naissance à de nombreux enfants en se reposant sur la politique familiale généreuse de la France, mais ne s’acquittent pas de leur obligation d’élever leurs enfants. Cela cause des dangers latents dans l’ordre public.

J’ai visité des amis chinois en France. Parmi eux il y a des étudiants dans la vingtaine, des immigrés septuagénaires, des intellectuels, des cadres d’enteprises, des travailleurs peu instruits. Ils sont unanimes à penser que la société française et les médias ont certains préjugés contre les Chinois. Les immigrés de l'ancienne génération en particulier insistent sur le fait que les Chinois sont toujours le groupe le plus assidu et le plus respectueux de la loi parmi les ethnies étrangères de France. Pendant une période relativement longue, la société française était amicale envers les Chinois. Elle lui était reconnaissante de n’avoir jamais créé le chaos dans la société française. Mais depuis cette dernière décennie, les médias ont souvent fermé les yeux sur les qualités des Chinois mais exagéré délibérément leurs défauts. Ils ont fixé leur attention sur certains Chinois en particulier en ignorant les autres et ont fait des reportages partiaux. Cette publication de Le Point en est un exemple flagrant.

Ce phénomène s’explique principalement par le changement en cours dans le rapport des forces entre états depuis ces dix dernières années. Dans le contexte de la mondialisation économique, la Chine et d'autres pays émergents ont connu un développement rapide, tandis que les anciens pays industrialisés dont la France ont décliné de jour en jour. Les difficultés économiques ont engendré un sentiment xénophobe en France. Les Français, qui se trouvent dans une situation désavantageuse dans la compétition mondiale, attribuent souvent leurs problèmes aux pays en développement et aux immigrants qui servent de bouc émissaire. L’attitude indulgente et amicale envers les immigrants, qui existait dans la période de prospérité économique, s’est muée en discrimination, en hostilité et en rejet, parallèlement à la détérioration de l’économie. C'est aussi la raison pour laquelle le parti d'extrême-droite xénophobe, le Front national, s’est développé rapidement ces dernières années et est devenu le troisième plus grand parti de France. L’ancien président Nicolas Sarkozy, dans la campagne présidentielle, avait aussi utilisé la carte de l’immigration pour gagner des voix. Quant à la Chine, elle est un chef de file parmi les pays émergents et se trouve temporairement dans une situation avantageuse par rapport à la concurrence mondiale. Les Chinois, qui n’avaient pas retenu beaucoup l’attention, sont tout à coup passés au premier plan. Les Français ne comprennent pas la Chine et ont peur d’elle. Ils pensent que les Chinois leur ont arraché leur emploi. Toutes sortes d’assertions sur la « menace chinoise » se sont fait jour. Les Chinois sont devenus l’objet des attaques des médias et des politiciens.

 

Plus de communication pour une meilleure compréhension mutuelle 

Objectivement, un petit nombre de Chinois en France font face à certains problèmes, comme l'absence de statut juridique et un travail au noir. La communauté chinoise doit regarder ces questions en face et les corriger. En réalité, elle est disposée à accepter toutes les critiques et la supervision bienveillante et constructive de la société française, à moins d’une cécité sélective montrée par les médias.

Il est à noter que certains prétendus problèmes des Chinois sont en fait des différences culturelles. Par exemple, dans la tradition chinoise, le travail acharné est une vertu. Mais les Français mettent l'accent sur l’accord entre le travail et le repos. On ne doit donc pas prendre le travail acharné des Chinois pour une forme de compétition malveillante et d’attention exclusive à l'argent, pas plus que les Chinois ne doivent accuser les Français d’être paresseux et hédonistes. Pour ces différences culturelles, plus de compréhension et de communication permettent d'éliminer les malentendus et les préjugés : d’autre part, les Chinois doivent respecter les traditions culturelles du pays, et les Français doivent, sur la base de la compréhension de la culture traditionnelle chinoise, aider les Chinois à comprendre la culture française, au lieu de seulement les blamer.

La société française et les médias devraient examiner leurs fautes. « Aucune nation n’est parfaite, ni la Chine, ni la France. La France ne doit pas attribuer sa situation difficile d’aujourd’hui à la Chine. En d’autres termes, les difficultés d’aujourd’hui en France ne sont pas causées par les Chinois. Il faut trouver la cause chez soi-même, au lieu de décharger sa colère sur d’autres. En effet, les immigrés chinois font partie de la famille en France. Tout le monde doit conjuguer ses efforts pour surmonter les difficultés », a déclaré l’ancien premier ministre français Jean-Pierre Raffarin, au séminaire La Chine au lendemain du 18e Congrès du Parti communiste chinois qui s'est tenu le 10 décembre 2012 à Paris, et qui était coparrainé par la Fondation Jean Lecanuet, le groupe de l'Union centriste du Sénat et la revue France Forum.

Dans le monde d’aujourd’hui, la dépendance mutuelle entre les pays et entre les peuples se renforce, la société française doit abandonner ses préjugés étroits envers les Chinois. Seuls des efforts conjugués permettront de sortir le pays de la crise.








Edité par Yao Xiaodan

Selon moi, il s’agit du concept de « réforme dans la stabilité ». À travers le processus historique de réforme...【PLUS】