Le renouveau des relations Chine-Amérique latine
2015-07-07 15:23:00
china.org.cn
WU Hongying

Le passage du premier ministre chinois en Amérique latine a permis d'ouvrir une nouvelle page dans la coopération. Retour sur cette visite. Il va sans dire que la visite du premier ministre Li Keqiang en Amérique du Sud revêtait un caractère historique et incarnait la volonté de la Chine de faire preuve de son attachement à cette région du monde. En effet, cela faisait 20 ans qu'un premier ministre chinois ne s'était pas rendu au Pérou, et 30 ans pour la Colombie. En tout, 4 pays pour cette visite du 18 au 26 mai dernier : Brésil, Colombie, Pérou et Chili. C'est la plus récente visite d'un dirigeant chinois en Amérique latine depuis celle du président Xi en juillet 2014.

Une voie de développement commune à trouver

C'est sur fond d'une situation internationale complexe à laquelle font face la Chine et l'Amérique latine que s'est déroulée cette visite. En effet, plusieurs facteurs tels que la crise financière mondiale, le ralentissement économique en Europe et aux États-Unis, la baisse du prix des matières premières, la diminution des investissements et la faible croissance de la consommation, freinent l'économie de la grande majorité des pays latino-américains. L'accroissement du PIB de l'Amérique latine n'a d'ailleurs été que de 2,6 %, 2,7 % et 1,1 % sur les trois années de 2012, 2013 et 2014. De plus, d'après le récent rapport de la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes, la croissance économique latino-américaine devrait s'établir à 1,0 % pour 2015, ce qui signifie une baisse continue de la croissance du PIB latino-américain depuis quatre ans.

Quant à la Chine, ressentant également l'onde de choc de la crise financière mondiale, de la crise de la dette européenne, du manque de dynamisme de la reprise économique américaine, tout en poursuivant sa restructuration économique et la transformation de son mode de développement, sa croissance est passée de 10,4 % en 2010 à 7,4 % en 2014. On dit qu'elle est entrée dans une « nouvelle normalité » caractérisée par un développement moyennement rapide.

Le ralentissement économique apparu simultanément en Chine et en Amérique latine a naturellement eu une influence sur les chiffres du commerce. La croissance des échanges commerciaux bilatéraux décélère depuis 2012. Leur volume est effectivement passé de 261,6 milliards de dollars en 2013 à 263,3 milliards en 2014, soit un taux de croissance de 0,65 % qui fait contraste avec la dynamique des 30 dernières années.

La Chine et la région latino-américaine cherchent alors à réaliser le double objectif présenté par Xi Jinping lors de sa visite en juillet 2014 : faire passer le volume des échanges sino-latino-américains à 500 milliards de dollars et faire monter le total des investissements chinois en Amérique latine à 250 milliards d'ici 2020. Pour ce faire, il convient, dans la coopération, de trouver de nouvelles idées, de diversifier les secteurs et d'explorer de nouveaux modèles.

Dans cette conjoncture, les pays latino-américains espèrent que la Chine maintiendra l'augmentation du volume de ses importations et élargira ses investissements sur le continent. Dans le même temps, la Chine compte s'appuyer sur l'énorme marché latino-américain, ainsi que les riches ressources énergétiques et technologies avancées de celui-ci, pour accélérer la transformation de son mode de développement économique, hâter la modernisation de ses industries, et assurer le développement stable et sain de son économie. C'est pourquoi la visite du premier ministre chinois en Amérique latine était placée sous le signe d'une coopération mutuelle pour faire face aux défis communs.

Le passé et le futur de la coopération

Voyons un peu l'histoire des relations entre la Chine et l'Amérique latine. Le premier pays d'Amérique latine à nouer des relations diplomatiques avec la R.P.C. en 1970 est le Chili, qui jouit depuis 2012 d'un « partenariat stratégique » avec la Chine. Pour le Pérou, c'est en 1971 que l'histoire avec la Chine commence et en 2008 que les relations bilatérales sino-péruviennes deviennent un « partenariat stratégique » puis se transforment en un « partenariat stratégique global » en 2013. Le Brésil et la Chine instaurent des relations diplomatiques en 1974. En 1992, celui-là devient le premier pays en développement à bénéficier d'un « partenariat stratégique » avec la R.P.C. et en 2012, il devient le premier pays latino-américain à établir un « partenariat stratégique global » avec elle. Quant à la Colombie, c'est en 1980 qu'elle établit des relations diplomatiques avec la Chine.

Li Keqiang s'est entretenu avec les différents présidents des États auxquels il a rendu visite. Ces rencontres ont permis de faire le point sur les relations bilatérales et de planifier la coopération à venir, tout en renforçant l'amitié et la compréhension mutuelle. Elles ont également permis de porter la coopération pragmatique dans l'économie et le commerce, et de dynamiser les relations Chine–Amérique latine.

Lors de sa visite, le premier ministre chinois a proposé un nouveau modèle de coopération et de nouvelles initiatives en ce sens à ses partenaires latino-américains. Ce nouveau modèle, intitulé « 3X3 », se résume en trois points. Le premier : l'élaboration de trois réseaux, c'est-à-dire logistique, électrique et d'information. Le deuxième : une meilleure coordination entre les trois entités que sont la société civile, les entreprises et les gouvernements. Le troisième : le développement de trois sources de financement pour les fonds, les crédits et les assurances.

Li Keqiang a également énoncé la politique des « 4 piliers » pour soutenir la coopération Chine–Amérique latine : la consolidation de l'amitié traditionnelle et de la confiance réciproque au niveau politique, la mise à niveau de la coopération commerciale, la promotion des échanges culturels et humains, le perfectionnement global des mécanismes de coopération. Voilà les grandes lignes de la coopération future Chine–Amérique latine.

Une visite fructueuse

Plusieurs résultats ont été obtenus lors de la visite du premier ministre chinois. Tout d'abord, une longue liste de contrats commerciaux. En tout, 67, dont 35 rien qu'avec le Brésil pour un montant de 27 milliards de dollars, 12 avec la Colombie, 10 avec le Pérou et 10 avec le Chili. Ces contrats regroupent plusieurs domaines dont l'économie, l'investissement, la construction d'infrastructures, le secteur manufacturier, l'agriculture, les technologies, la finance, la culture, l'éducation, etc.

Le premier ministre chinois a également annoncé la création d'un fond spécialisé dans la coopération énergétique Chine–Amérique latine pourvu de 30 milliards de dollars. La Chine a aussi prévu d'acheter 60 avions brésiliens ; une première commande de 22 engins a été passée. La Banque industrielle et commerciale de Chine (ICBC) a également signé une convention de financement d'une valeur de 10 milliards de dollars avec la société pétrolière brésilienne Petrobras. Le Brésil a quant à lui passé une commande de 604 trains, 7 ferries et 28 porte-conteneurs à la Chine. Par ailleurs, un protocole sanitaire concernant les exportations de viande bovine brésilienne vers la Chine a été ratifié, levant l'interdiction de 2012 qui bloquait les producteurs brésiliens autrefois qualifiés d'exporter de la viande en Chine.

En Colombie, c'est dans l'agriculture et les infrastructures qu'ont été signés des contrats. Ils comprennent notamment la participation d'entreprises chinoises à la construction du tramway dans la partie est de Bogota. Au Pérou, s'est ouvert le premier Dialogue stratégique sino-péruvien sur l'économie lors de cette visite. Parmi les thèmes abordés : le règlement en RMB dans les échanges commerciaux, le swap de devises et les modes de financement. Au Chili, une convention de swap de devises a été signée. La capitale Santiago a donc accueilli la première banque de compensation en RMB d'Amérique latine. La Chine a également accordé un quota de 50 milliards de yuans aux investisseurs institutionnels étrangers qualifiés du Chili.

De plus, dès le 1er juillet 2015, la gratuité des demandes de visa pour les voyageurs chinois souhaitant se rendre au Chili sera effective. La Colombie a, elle, décidé de ne plus exiger de visa aux ressortissants chinois remplissant les conditions. Ces mesures devraient attiser la curiosité des touristes chinois envers le continent sud-américain.

Cette visite était définitivement tournée vers l'avenir. Plusieurs documents pour entériner la coopération ont été ratifiés, dont le Plan d'action Chine–Brésil 2015-2021, la Convention-cadre sur la coopération et l'investissement dans le secteur énergétique et le Communiqué sino-brésilien sur le changement climatique. Li Keqiang a également annoncé la création d'un groupe de travail Chine–Brésil–Pérou pour étudier la faisabilité du projet ferroviaire Pacifique–Atlantique.

Ainsi, on peut dire que ce passage en Amérique latine du premier ministre chinois a répondu à la demande des pays de la région pour renforcer la coopération avec la Chine. Il permettra de réaliser une « connexion énergétique » entre la Chine et ses partenaires d'Amérique du Sud, tout comme il favorisera la coopération commerciale entre les deux régions.

Les échanges humains mis à l'honneur

Un autre volet de cette visite concernait la multiplication des échanges humains pour asseoir l'amitié traditionnelle entre la Chine et ses partenaires latino-américains. Lors de sa visite, Li Keqiang a participé à une série d'activités culturelles, dont le séminaire Chine–Amérique latine sur les échanges humains en Colombie, aux côtés du président Santos. Étaient présents une centaine d'auteurs et d'artistes chinois et latino-américains. Une marque de l'importance accordée par les dirigeants des deux pays aux échanges culturels et de leur volonté de les promouvoir.

Un éventail de documents de coopération dans les domaines de la culture, de l'éducation et de la formation de ressources humaines ont été signés entre la Chine et les 4 pays visités par le premier ministre. Ces actions devraient permettre aux Chinois de découvrir plus profondément l'histoire, la culture et la société en Amérique latine. De même, cela devrait donner aux Latino-américains la possibilité de mieux comprendre et soutenir le rêve chinois. Le but ultime de cette visite ? Le raccrochement du rêve latino-américain au rêve chinois.

* Réalisé par WU HONGYING, directeur du bureau sur l'Amérique latine à l'Institut chinois des relations internationales contemporaines.

 

 

 

 

 

 

 

 

Edité par  Yao Xiaodan
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